Le théâtre Corona était plein à craquer jeudi soir lors du passage très attendu du groupe originaire de Santa Fe, Beirut. Figure de proue du indie-rock sur la scène internationale, Zach Condon s’est avancé devant une foule complètement survoltée, ce qui aurait dû donner une dose d’énergie au groupe.
Au lieu de cela, nous avons eu droit à une prestation qui gravitait beaucoup plus autour d’une journée de travail banale que du plaisir qu’une performance sur scène peut apporter. Le peu de fois que Zach Condon s’est adressé à la foule a été pour dire qu’il avait pris du poids, ayant abusé de nos poutines locales. Malgré un groupe composé d’un batteur, d’un pianiste, d’un bassiste et de deux membres exclusifs aux cuivres dont le chanteur lui-même, la chimie n’était vraiment pas au rendez-vous.
Le groupe avait l’air complètement blasé, se regardant à peine, n’échangeant aucun mot, aucune synergie : « on fait notre job et on a hâte de passer à autre chose » était le sentiment profond ressenti sur scène. Pour une salle aussi intimiste que celle du Corona, tout est doublement ressenti par le public. Ce dernier a véritablement été la vedette de la soirée de par ses encouragements soutenus, et ce, malgré une performance du groupe qui sera vite oubliée.
Quelque peu répétitif
Pour un groupe qui a quatre albums et cinq EPs à son actif, je m’attendais à une certaine maturité sur scène. Ce qui m’a frappé le plus, c’est le tempo. Une chanson commence, Zach chante quelques lignes, les cuivres embarquent et font quelques notes et s’arrêtent, Zach reprend et on recommence. Sans aucun nouvel arrangement live, avec l’énergie à plat du chanteur, les chansons du groupe se ressemblaient toutes et je crois que c’est une des raisons pourquoi personne ne chantait en cœur avec le groupe.
Et puis viennent les succès
On a senti un regain du public lors des performances de Santa Fe, No No No, Elephant Gun, Perth, mais malheureusement pas du groupe. Ce qui aurait dû être un spectacle électrifiant de par la diversité et le talent des instrumentalistes sur scène, est tout simplement tombé à plat. Le public enthousiaste a eu droit à un Zach Condon dans un état complètement opposé, regardant le sol entre ses chansons et ne communiquant peu ou pas du tout avec ses partisans.
S’étant retiré plusieurs fois dans sa carrière pour prendre une pause due à la fatigue des tournées et de ses nombreuses séparations, Zach Condon nous a prouvé que le nuage noir qui l’entoure ne s’est peut-être pas encore dissipé autant qu’il le faudrait. Mon sentiment est qu’avant de décevoir autant son public, peut-être qu’une nouvelle pause serait bénéfique, autant pour lui que le groupe, afin de prendre la distance nécessaire et revenir en force.
Une prestation-sabordage comme celle présentée au Corona jeudi soir est un signe que le groupe a visiblement besoin de renouveau et d’inspiration. On sait que Beirut est une contrée lointaine, mais jamais je n’aurais imaginé qu’elle puisse être aussi distante même quand elle se déplace sur les planches de Montréal !
Une première partie impeccable
C’est à Little Scream, la formation de Laurel Sprengelmeyer, que revient l’étoile de la soirée. En effet, cette multi-instrumentaliste née en Iowa et vivant maintenant à Montréal accompagnée de son groupe, a su nous séduire par sa joie contagieuse de jouer pour nous.
Elle nous a fait le plaisir de quelques chansons tirées de ses deux albums The Golden Record (2011) et Cult Following (2016), coproduits par Richard Parry d’Arcade Fire. Little Scream a assuré et s’est nettement démarquée par son humilité. Lorsque le public l’a acclamée d’applaudissements, elle s’est exprimée en ces mots : « Vous êtes venus voir Beirut, vous allez voir, vous ne serez pas déçus ». C’est OK Laurel, assume les applaudissements, tu es de loin celle qui les méritait le plus ce soir-là !