Lorsqu’elle a négocié les droits d’adaptation de L’avalée des avalés, Lorraine Pintal avait dû promettre à Réjean Ducharme que son œuvre serait jouée dans des petites salles pour en préserver le caractère intime. Le hasard a voulu que sa sortie montréalaise soit programmée pendant la pandémie. C’est donc dans l’intimité de chacun des spectateurs, par le biais d’une Webdiffusion sur le site du TNM, que la pièce est présentée jusqu’au 17 décembre prochain.
Réjean Ducharme et Lorraine Pintal
Lorraine Pintal, directrice du Théâtre du Nouveau Monde (TNM) est une habituée de l’univers de Réjean Ducharme. Ses mises en scène de HA ha !…, Inès Pérée et Inat Tendu et L’Hiver de force ont marqué le monde du théâtre.
Cette fois, c’est au premier roman, et sans doute le plus marquant de ce mystérieux auteur, qu’elle a souhaité s’attaquer.
Sortie au Québec
Créée avec succès à Avignon et reprise à Paris en 2018, son adaptation de L’avalée des avalés a reçu un accueil dithyrambique tant de la critique et que du public. Et c’est maintenant au tour du public québécois de la découvrir sous forme de théâtre de chambre.
L’avalée des avalés remanié
De l’histoire originale, la dramaturge n’a conservé que trois personnages, soit Bérénice Einberg (Sarah Laurendeau), son frère Christian (Benoît Landry) et leur mère (Louise Marleau), surnommée Chat Mort ou Chamomor.
L’essence de l’histoire se situe donc dans les rapports tordus de ce triangle particulier. Bérénice navigue entre l’amour éperdu qu’elle voue à son frère et la relation avec sa mère qui oscille entre le froid distant et la chaleur étouffante.
Un jeu magnifique dans l’univers de Ducharme
Ne joue pas Ducharme qui veut. Son univers particulier, mais surtout sa prose hors du commun peut être difficile à se mettre en bouche.
Or, Sarah Laurendeau s’acquitte magnifiquement de la tâche colossale de porter le monologue fleuve de Bérénice.
Entre les envolées lyriques et les mots inventés, elle parvient à faire transparaître les émotions vives et le sentiment d’urgence ressentis par son personnage.
Ses partenaires de jeu ne sont pas en reste. Louise Marleau dépeint à merveille toute la complexité des relations mère-fille.
Benoît Landry est aussi très convaincant dans le rôle du grand frère déchiré entre l’amour qu’il porte à sa sœur et son désir de s’affranchir.
Scénographie portative signée Charles Binamé
Pour ce spectacle intime, Lorraine Pintal a fait appel aux talents de Charles Binamé pour réaliser une scénographie portative.
Le cinéaste a conçu un cube décoré à la manière des trophoux, ces collages d’objets hétéroclites signés Roch Plante (un pseudonyme de Ducharme), dont la vocation change au fil des scènes.
L’action se concentre dans et autour de ce cube, limitant l’espace scénique occupé et créant ainsi le sentiment d’entrer dans l’’intimité des personnages.
L’avalée des avalés en webdiffusion – Une réussite!
La mise en scène, le jeu des acteurs et la scénographie font en sorte que l’on se sente aspiré dans l’univers de Ducharme et que l’on oublie l’espace d’un instant que l’action se déroule sur notre écran d’ordinateur. Une réussite en ces temps où tout se passe en ligne!
L’avalée des avalés est disponible est webdiffusé par le TNM jusqu’au 17 décembre et en salle du 18 mai au 6 juin 2021.
Distribution : Sarah Laurendeau, Benoît Landry Louise Marleau
Adaptation et mise en scène : Lorraine Pintal
Scénographie: Charles Binamé
Crédit photos: Yves Renaud
Texte: Nancie Boulay